Vincent Krembel
Patoro
Directeur des ventes et du marketing pour l'Europe
C’est dans la région liégeoise et plus particulièrement à la
Maison Baelen, que j’ai rendez-vous avec Vincent Krembel pour un échange.
Celui-ci m’a déjà été fort utile pour le blog lorsqu’il était chez Davidoff
(pendant 29 ans) et nous avons eu divers échanges (mails, Skype, Messenger)
mais mis à part quelques minutes à Dortmund, je ne l’avais pas encore rencontré
en chair et en os.
Après avoir allumé le cigare qu’il me proposait (j’ai opté
pour la gamme Brasil, que j’apprécie beaucoup), je suis rentré directement dans
le vif du sujet.
- Je ne vais pas te demander comment on passe de Global Brand Ambassador à la vente au détail dans une civette suisse parce que cela fait partie, je trouve, de l’ordre de la vie privée, mais plutôt comment est-ce qu’on passe de presque 30 ans dans la Maison Davidoff à une nouvelle marque pratiquement méconnue, en Belgique en tout cas ?
La réponse est simple
et elle se résume en 3 points : Passion, Excellence et Responsabilité.
La Passion de ce que
je fais, celle qui va me pousser à me surpasser, celle qui donne des ailes.
L’excellence, chose
primordiale dans notre secteur d’activité et celle-ci doit se répercuter à tous
les niveaux de l’entreprise et dans tous ses secteurs d’activités
Et enfin la
Responsabilité, celle-ci est notre devoir aussi bien envers nos collaborateurs,
nos cultivateurs que nos clients amateurs mais aussi au niveau de la nature et
de l’environnement. Il faut cultiver de manière respectueuse et protectrice
pour le long terme.
Quand j’ai fait mon
bilan et que j’avais l’impression de ne plus retrouver ces 3 points
fondamentaux pour moi dans la nouvelle direction, j’ai repris mon bâton de
berger et j’ai été voir ailleurs. Et puis c’est un beau et magnifique challenge
que je vis avec Patoro.
Une nouvelle Mission,
celle de communiquer notre savoir-faire, celle d’expliquer aux épicuriens ce
qu’est réellement un cigare, le soin et le temps nécessaires à sa création, la
bonne façon de couper un cigare, de l’allumer, et d’en tirer le maximum de ses
capacités, voilà ce qui m’a attiré dans cette nouvelle aventure.
- Parlant de coupe, qu’est-ce que tu penses de la coupe en V ?
Zino Davidoff disait
toujours que la coupe droite à l’aide de ciseaux ou de guillotines double-lames
était ce qui permettait le mieux au cigare d’offrir à l’aficionado le meilleur
de son assemblage. Cet enseignement est pour moi toujours valable et aujourd’hui plus que jamais pour diverses raisons.
Concernant la coupe en
V, il faut revenir à l’invention des premières machines à rouler les cigares à
la fin du dix-huitième, début dix-neuvième siècle. A ce temps-là les fabricants
ont trouvé fort désagréable d’avoir des petites particules de la tripe courte
(short-filler) dans la bouche après avoir coupé leur cigare (ce qui est très
rare voire impossible avec un long filler). Donc ils ont essayé de couper en V
et ont été très satisfaits du résultat ; ils avaient beaucoup moins de tabac en
bouche.
Mais avec un long
filler, si tu le coupes en V (cela vaut également pour l’emporte-pièce si le
diamètre n’est pas suffisamment important), tu modifies totalement la surface
de coupe et donc tu vas apporter une modification de la circulation de l’air au
travers de ton cigare. Des masters blender et producteurs ont travaillé et
réfléchi longuement pour avoir un cigare à la combustion parfaite, un tirage
exceptionnel et un équilibrage et cela avec un savant calcul sur la longueur,
le cepo et le diamètre d’ouverture. Donc en modifiant celui-ci tu risques
d’avoir des répercussions négatives sur la combustion du tabac et donc la
qualité de la fumée qui, tout en devant rester la plus froide possible, diffuse
les goûts et arômes du tabac (NTA : je dois reconnaitre que comme avec
l’emporte-pièces si je pratique une coupe en V, je dois dégazer plus souvent
mon cigare que lorsque je le coupe droit).
- Vous avez à l’heure actuelle 6 gammes de cigares (une est exclusive à la Suisse) ; cette gamme est quand même à un prix relativement élevé même si cela reste dans des prix raisonnables pour ceux distribués chez nous, comment expliquez-vous cela ?
C’est d’abord Philippe Van Wilderode qui prend la parole
(distributeur de la marque pour le Belux) : quand
nous mettons une nouvelle marque sur le marché nous rencontrons la société et
nous établissons un plan de distribution en fonction de nos marchés, de la
production…. Dans le cas de Patoro, nous avons pris la gamme des 5 modules
commercialisés hors la Suisse. Nous travaillons en collaboration avec les
civettes, qui eux connaissent leur clientèle et les amateurs. C’est ainsi que
certains ont à ce jour deux modules, d’autres les cinq… Tu sais, Patrick, j’ai
régulièrement des personnes qui me demandent si on va rentrer telle ou telle
marque. La charge de travail pour une nouvelle marque ou gamme est de plus en
plus lourde avec les législations donc cela doit être rentable pour tous. Il
est impossible de rentrer un cigare pour une demande de quelques consommateurs
Vincent est tout à fait d’accord et il me donne sa réponse : oui certains de nos cigares ont un prix
élevé mais c’est une volonté de faire de la qualité avec des tabacs portés à
maturation idéale pendant de nombreuses années, une recherche particulière dans
les assemblages, des conditions idéales d’entreposage et un apport d’aide
sociale à nos employés (NTA : discours que j’ai entendu il n’y a pas
longtemps dans la bouche de Jeremiah Meerapfel, Carlito Fuente ou Bobby
Newmann). Tout cela a un prix et le
dernier point explique que la République dominicaine soit l’un des pays
producteurs de cigares économiquement et politiquement parlant les plus stables
! (NDA :Je pense que nous faisons aussi l’erreur en Europe quand on dit qu’un
cigare est cher de tenir compte des accises sur le tabac en plus de la T.V.A
qui ne vont pas dans la poche des fabricants mais qui a une grande répercussion
sur le prix affiché).
Philippe nous interrompt pour rappeler qu’il y a encore du
trajet pour Bruxelles et que si Vincent ne veut pas rater son avion, il est
temps de prendre la route.
Je les remercie pour cet échange, les laisse partir et finis
mon cigare, avant d’en recommander un d’une autre marque, mais cela est une
autre histoire.
Commentaires
Enregistrer un commentaire
Laissez ici, vos commentaires, retour sur l'article et/ou la dégustation