Chimay
150
C’est le 25 juillet de l’an 1850 que 17 moines de l'Ordre
cistercien de la stricte observance s’établirent sur le territoire de Forges à
7 kilomètres de la ville de Chimay.
Ceux-ci sont partis de leur communauté de moines trappistes
de Westvleteren (Ypres), à l’initiative de l’abbé Jourdain (prêtre de la région
de Chimay) pour installer un prieuré sur des terres offertes à l’ordre par le
Prince Joseph de Chimay. Dès leur arrivée, ils se sont mis à l’ouvrage comme en
atteste une inscription sur les fondations : Le 25 juillet 1850 les moines cisterciens fondant l’abbaye de
Scourmont commencèrent à louer Dieu et à défricher la terre.
Assez rapidement, seulement 21 ans après leur installation,
le prieuré est élevé au rang d’abbaye en 1871.
Les moines doivent subvenir à leurs besoins et se lancent
donc dans deux produits emblématiques des moines trappistes, si je peux m’exprimer
ainsi : le fromage dont la production comment en 1876, et le sujet qui
nous intéresse dans cet article, la bière dès 1862. Comme ils sont respectueux
de la règle de Saint Benoit, je suppose, comme pour Orval, qu’ils ont une bière
moins alcoolisée pour leur consommation personnelle d’une boisson par jour et
sans obligation.
Donc ce jour, je vais vous faire part de ma dégustation de
la Chimay 150, connue sous le vocable de Chimay verte.
J’ai devant mes yeux une bouteille de 75 cl d’authentique
bière trappiste… Pourquoi, il y en aurait des fausses ?
Il y a en Belgique 3 catégories de bières d’abbaye :
les bières d’abbaye, les bières d’abbaye reconnue et les trappistes. Il faut
attendre une décision du tribunal de Gand en 1962 pour définir tout cela et
avoir une protection juridique sur le sujet. Pour en savoir plus, je vous
invite à lire mon article sur les dénominations.
Mais les moines trappistes vont encore plus loin en fondant en 1997 l'Association internationale trappiste (AIT), en vue de délivrer un logo Authentic Trappist Product, garantissant le respect de certains critères spécifiques :
Ce produit doit être
fabriqué au sein d’une abbaye cistercienne trappiste ;
Il doit être réalisé
par ou sous le contrôle de ses moines ;
Les revenus doivent
être consacrés à des œuvres à caractère social, une fois les besoins de la
communauté monastique satisfaits.
L’étiquette verte nous donne de suite le diapason Bière
Blonde Forte, le nom de la bière Chimay 150, puis des rappels comme le nom de
l’abbaye, le pays où elle se trouve…
Je ne peux que confirmer qu’il s’agit bien d’une bière forte
puisqu’elle est tirée à 10°ALC. ce qui la classe deuxième dans le degré
d’alcool de la brasserie puisque les bières vont de 10.5° (la grande réserve) à
4.8° (la dorée).
Mais pourquoi 150 ?
Simplement parce que cette bière est liée à la vie de
l’abbaye ; elle a été brassée en 2012 pour fêter les 150 ans de la
brasserie. C’était une édition spéciale et limitée à 150.000 bouteilles. Et
nous avons la chance que 10 ans après, nous la retrouvons de nouveau sur le
marché. Coup purement commercial ? Sincèrement je ne le pense pas, pour
deux raisons.
La première, la brasserie est encore loin d’atteindre sa
quantité de production maximum mais est proche du palier de droit d’accises.
Cela est long à expliquer et sans grand intérêt, sachez juste que si la
production dépasse une certaine quantité d’hectolitres, le taux des taxes
augmente considérablement, ce qui n’intéresse pas les moines car cela serait un
travail supplémentaire pour un gain inférieur et une forte diminution des
rentrées pour les œuvres caritatives.
La deuxième est que vu le succès et l’écoulement rapide des
150.000 bouteilles et la demande des amateurs de la bière de Chimay, le
directeur en charge de la production a palabré avec le Père Abbé pour avoir
l’autorisation d’augmenter la production et remettre cette ligne verte en
chantier.
Mais assez parlé d’histoire, de taxes et de puissant
breuvage, place au plaisir de la dégustation.
Comme à l’accoutumée j’utilise le verre ad hoc dans lequel je verse ma boisson.
J’ai une bière d’une couleur doré pâle et une mousse légère avec une myriade de petites bulles ; elle est juste assez compacte pour tenir au verre et déjà dégager un aspect très attirant et irrésistible.
On sent bien le houblon accompagné de fruits secs, une
touche de bergamote vient compléter le tout.
Lorsque je trempe mes lèvres, j’ai un aspect de grande
amertume qui me tapisse la bouche. Je suis surpris car celle-ci devient
rapidement douce et persistante.
J’ai des saveurs mentholées. Très vite la bière me renvoie à
ma formation d’huiles essentielles et j’ai en fait deux sortes bien distinctes,
l’eucalyptus mentholé et l’eucalyptus citronné, avec une pointe de clou de
girofle.
On voyage avec cette bière faite à base d’une recette
ancestrale car je suis maintenant au pays du gingembre et du romarin.
Le tout dans un mélange équilibré et très rafraichissant.
J’ai décidé de faire un test avec un Avo 2021, celui-ci est bien plus concluant qu’avec la bière prise pour l’article sur le cigare. Vous vous souvenez que je vous ai parlé de cette douce amertume persistante. Et bien elle va me permettre de rehausser de manière sublimatoire les différentes épices de mon cigare et le mélange romarin, gingembre, eucalyptus d’un côté, et le poivre, chocolat, muscade de l’autre vont rentrer dans une harmonie parfaite.
J’ai fait la dégustation d’une bouteille de 75cl mais elle
est commercialisée aussi en 33cl.
En conclusion : une bière qui a un taux assez élevé en
alcool mais qui se boit agréablement avec son aspect désaltérant et
rafraichissant. Elle a aussi un côté digeste par son amertume.
Je vous invite donc à vous rendre chez votre fournisseur
habituel et vous faire votre propre idée sur ce breuvage divin que vous pourrez
vous procurer pour ± 2.50 euros (33cl) et ± 6 euros (75cl)
J’attends avec impatience vos retours et commentaires sous
cet article.
Merci pour cette dégustation merveilleusement renseignée et à bientôt, j'espère... Amicalement. Eric de REIMS - Cercle Champenois du Cigare
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